Roland Ratzenberger: la
tête de l'autrichien bascule d'un côté sur l'autre de son baquet...
L'image ne laisse présager rien de bon: ce week-end sera hélas le
pire de toute l'histoire de la F1
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Dimanche
1 mai 1994.
Ce dimanche matin, jour férié, je décide de ne pas regarder le GP. Curieusement, je suis content de voir Senna dominé par le jeune
Schumacher. En vrai fan d'Alain Prost, je sens le brésilien capable de remporter une couronne mondiale supplémentaire et se rapprocher du nombre de victoires du français. Mais le matin même, auto-moto présentait le tour de circuit embarqué et commenté par Ayrton, ce dernier avait l'air d'être perdu, il faisait la paix avec son ancien rival et déclarait: Alain tu me manques! Une séquence très émouvante, qui balayait d'un seul coup les moments de rancœurs et d'affrontements houleux entre les deux hommes. De
par la suite des évènements, ce petit moment de télé est devenu un adieu magnifique d'un grand pilote à un autre grand... Je décide donc de faire tourner le magnétoscope de salon une fois de plus. C'était de toute façon, la période où j'enregistrais systématiquement tous les GP. Seulement, j'avais un impératif, je devais poser l'isolation de notre maison, et les artisans seraient à
pied d'œuvre dès le début de la semaine suivante... Habitué du différé qui me permettait de zapper la publicité déjà très présente, je n'ai pas écouté la radio de la journée et suis rentré pour dîner tranquillement. Des copains avaient déjà téléphoné pour avoir ma réaction, mais ma femme, habituée m'avait ménagé et n'avait absolument pas laissé filtrer les informations. Je la trouvais bien évasive en répondant au téléphone, mais sans plus. C'est donc relativement décontracté que je regarde ma cassette. En effet, l'ambiance était tout de même étrange. La journée avait été particulièrement chaude et j'avais encore en mémoire la mort de Roland Ratzenberger et le terrible accident de Rubens
Barrichello aux essais. Je trouvais également étrange la présence de ma femme dans le salon pour regarder le GP? Mais lorsque le départ fut donné, l'accident sur la grille en était sans doute l'explication, elle savait le départ catastrophique et avait voulu voir la retransmission? Puis très vite, j'ai compris. Après une page de pub passée en vitesse rapide, la caméra s'attarde sur une
Williams en lambeaux vue d'hélicoptère à travers les arbres. Damon Hill? Non, c'est Senna. Un corps de pilote baigne dans le sang tandis que des secouristes s'affairent. Ayrton est sorti de la piste. Je sais qu'il est mort. Le grand prix n'a plus aucune valeur à mes yeux. Les flashs d'info se succèdent et je reste scotché sur l'actualité en direct. L'impensable venait d'avoir lieu et je ne pensais pas pouvoir ressentir une émotion aussi vive envers cet homme que j'avais maudit au plus profond de moi depuis des années. Je venais de réaliser que si Prost avait été un aussi grand champion, c'était grâce à Ayrton. Le duel au sommet qui avait animé mes dimanches pendant des années venait de connaître son épilogue. Prost était orphelin, et tous ses fans avec lui. Et que dire des fans de Senna!
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